Librairie Pierre Saunier

Lettres à deux femmesLettres à deux femmes Lettres à deux femmesLettres à deux femmes

Coulanghéon (Jacques-Arsène).
Lettres à deux femmes. Avec un portrait de l'auteur gravé sur bois par P.-E. Vibert d'après le tableau de Judith.

Paris, Société du Mercure de France, 1908 ; in-12, reliure souple à la bradel en tissu, témoins, couverture et dos conservés (Alidor & Vilaine). 225 pp.

850 €

Édition originale posthume.

Un des 12 exemplaires sur papier de Hollande, seul tirage de tête.

Jules Claretie a dit de Jacques-Arsène Coulanghéon dans le Temps : « J’avais vu couronner ce jeune homme au Concours Général. J’avais lu ses premiers vers. Il avait écrit une excellente étude des mœurs des petites villes, Les Jeux de la Préfecture. Il rêvait de faire, comme on dit, du théâtre, et ses premiers essais annonçaient un observateur, des succès futurs. Beaucoup de mélancolie, une sensibilité douloureuse, des traits à la Flaubert, un pessimisme attendri caractérisaient ce jeune homme. Anatole France lui dédiait une des nouvelles de son dernier volume, Riquet, celle qui vient après Crainquebille. La jeune littérature perd une force. » J. A. Coulanghéon — qui a subi l’influence d’Anatole France, — laissa trois volumes, l’Inversion sentimentale, Les Jeux de la Préfecture et Le Béguin de Gô. Ce dernier parut neuf jours avant sa mort. C’était un esprit fin, ironique, assez âpre parfois et saturé de littérature. Ses ouvrages sont pleins de talent, et il n’est pas douteux que bientôt sa personnalité se fût affranchie et qu’il eut donné des œuvres très remarquables. (Georges Casella & Ernest Gaubert, La nouvelle littérature, 1895-1905 ; Figuière 1906)

Lettres à deux femmes, publié après la mort de l’écrivain (1875-1904), jeune collaborateur du Mercure de France, contient d’authentiques lettres écrites à deux femmes d’une existence prouvée – l’une serait Rachilde, l’autre Colette – point de roman composé, d’intrigue voulue, de fable ou d’aventure arrangée conformément à la vie. Un jeune homme, atteint d’un mal qui doit fatalement l’emporter, écrit à l’une et à l’autre de ces femmes pour essayer de se distraire, mettre à nu son cœur et son cerveau, en leur demandant l’échange d’un peu de fantaisie : Avant de nous séparer / Il faut rire, il faut rire / Avant de nous séparer / Il faut rire et s’amuser ! Le refrain de cette vieille ronde enfantine semble dominer cette situation horriblement dramatique d’un homme se sachant condamné et s’efforçant à rire de lui-même, de ses amis, de ses ennemis, de la vie décevante et de la mort si proche, tout en flirtant avec deux inconnues, ses deux correspondantes, qu’il désire ignorer pour mieux jouer à cache-cache. Hélas ! le roman était déjà fini qu’il songeait encore à la manière de le produire, et le dénouement tragique arrivait, le foudroyant, lui arrachant la plume des mains, alors qu’il notait son mépris du drame noir et de la littérature outrancière !

La vie se réserve toujours l’invraisemblable.

Bel exemplaire.